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William Theviot, pianiste et autiste : « les promesses non tenues sont une forme de maltraitance »

William Theviot, pianiste girondin et diagnostiqué autiste Asperger milite pour une meilleure inclusion des artistes en situation de handicap.
William Theviot est un pianiste girondin passé par le conservatoire. Diagnostiqué à 20 ans, son parcours témoigne des difficultés pour une personne autiste à évoluer dans le secteur de la visiblement trop bien nommée "musique classique".

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    Il s’appelle William. William Theviot. Il a 30 ans. Pianiste de formation, il a fait ses gammes aux conservatoires de Mérignac et Bordeaux, villes qu’il continue d’arpenter aujourd’hui. Au terme de ses concerts, l’artiste prolonge le plaisir par des conférences pour partager le fruit de ses recherches en musicologie. Celles sur les liens entre musique et vin aiguise l’appétit. Mais en dehors des cercles de l’art et du savoir, William ne joue pas. Il se bat pour une cause qui le touche : l’inclusion des personnes handicapées, notamment dans le secteur culturel.

    Diagnostiqué autiste il y a 10 ans, William traîne aujourd’hui un certain spleen, dans la quête d’un idéal où les porteurs de troubles du spectre de l’autisme  (TSA) ne verraient plus leurs projets entravés par l’incompréhension et la méconnaissance à l’égard de leur différence. Un « handicap invisible » dans le cas du girondin.

    Cet engagement se manifeste par la publication d’un livre auto-édité en septembre 2023. « Journal d’un Asperger, un an dans ma bulle de verre » est un recueil de textes écrits au fil de l’eau lors de la si particulière période de restrictions sanitaires liées à la pandémie de Covid-19. Un « récit introspectif » que William propose pour « aider à mieux comprendre les autistes » en faisant pénétrer le lecteur dans son « monde intérieur ».

    William Theviot, pianiste autiste Asperger à Bordeaux.
    « Jusqu’à présent, c’est la musique qui m’a rapproché des gens, elle qui ne connaît que le langage du cœur. Maintenant, j’ai choisi de compléter les notes par des mots, l’écriture étant ma seconde passion après le piano. » (©Richard Monteil / Zèbres et Compagnie)

    L’autisme, « on n’en parle pas »

    Il impose parfois son message par effraction, comme lors de ce congrès européen sur l’autisme, à Cracovie, en octobre 2022. « La thématique culture et handicap n’était pas au programme, pourtant il y avait une kyrielle de conférences », s’étonne encore William. Alors, ce jour-là,  il grimpe sur scène et s’empare du micro pour un éloquent plaidoyer. Extrait : « Il n’y a souvent que des initiatives ‘autism-washing’, à grand renfort de communication et beaucoup de responsables qui ferment les yeux sur la douleur du plus grand nombre de personnes autistes mal intégrées (…). En France, seules 2 % des personnes autistes bénéficient d’une insertion professionnelle. Encore moins dans les métiers culturels. »

    Séquence plus grand public, en mars 2023. Après avoir maladroitement interviewé sur sa chaîne YouTube Patrick Poivre d’Arvor, alors qu’une vingtaine de femmes accusaient déjà l’ancien présentateur vedette d’agressions sexistes et sexuelles, William subit un torrent de critiques sur les réseaux sociaux. Dans la foulée, les équipes de Touche pas à Mon Poste accueillent le pianiste en plateau pour entendre ses explications. Mais William détourne la séquence pour défendre sa cause plutôt que sa personne.

    Les larmes aux yeux, il élude « l’angle sulfureux » de la polémique sur lequel l’interrogent Cyril Hanouna et ses chroniqueurs pour mieux marteler son désespoir : « Ce que je suis venu dire, c’est que ce serait bien qu’il y ait davantage de considération pour les artistes en situation de handicap. Il y en a qui sont maltraités, méprisés, abusés, et on n’en parle pas. C’est de ce tabou que je suis venu parler. Je sais que vous avez des impératifs d’audience. Mais je pense que parler d’autisme et de représentativité dans les médias, ça peut être plus constructif socialement que de parler de cela. »

    Un parcours scolaire semé de douleurs

    Au quotidien, le piano adoucit la vie de William. C’est sa mélomane de mère qui l’a aiguillé vers la musique. « Ça a été un agréable bruit de fond qui a commencé à me coloniser et qui a pris l’espace de ma pensée pour faire prothèse à mon isolement scolaire et à mes défaillances verbales. Je ne savais pas parler, ça m’échappait. J’étais timide, maladivement », raconte l’artiste.

    Des bancs de l’école, comme de ceux du conservatoire qu’il intègre en fin de maternelle, il conserve un souvenir amer. « Ce n’étaient pas des rapports heureux », se souvient le pianiste. William est curieux, il pose beaucoup de questions à ses enseignants, des questions précises,  des questions techniques, et fait preuve d’une – trop ? – grande franchise. Il est différent. Isolement, harcèlement, rejet. William souffre.

    « Mon manque d’intégration scolaire se confirmait et se généralisait, alors un psychiatre m’a orienté vers des tests », se souvient le pianiste. Il a 20 ans lorsque le diagnostic tombe enfin, après « 2 ou 3 ans » de rendez-vous médicaux contraignants. Et après ? « Je ne saurais pas considérer s’il y a eu une prise de conscience à cet égard là. C’est très flou. Il y a des personnes qui ont pu être compréhensives, dans une démarche d’accueil. D’autres se sont révélées aussi hostiles qu’avant, voire plus », témoigne-t-il.

    Des « crispations » jusqu’au conservatoire

    « Le conservatoire n’est pas adapté aux profils de personnes qui sont vulnérables, et c’est bien dommage », regrette William. « Ma curiosité intellectuelle n’était pas vraiment acceptée. J’essayais de poser des questions pour aller plus loin que la partition. Je demandais des conseils pour jouer de façon plus délicate, de façon plus fine. Je posais des questions sur les compositeurs, je proposais parfois d’en jouer certains », témoigne le pianiste.

    C’était des gestes d’hostilité passive, d’hostilité froide. Il n’y avait pas de bonne volonté, pas d’égard.

    Trop bon élève ? « Il y avait des crispations. On ne ne me faisait pas jouer en auditions alors que j’étais prêt, quand d’autres élèves avaient leur chance. Parfois on me proposait de choisir entre deux morceaux et on me faisait finalement jouer l’autre. Je ne sais pas si c’était volontaire mais c’était très maladroit », regrette-il encore. À cela s’ajoutent les masterclasses auxquelles il n’était pas convié, les auditions promises qui n’arrivaient jamais, sa mise à l’écart d’examens par des enseignants qui « ne voulaient pas faire perdre de temps au jury ». Certains enseignants ont-ils voulu lui faire payer d’avoir assuré un concert alors qu’il était encore élève, chose proscrite par le règlement ? William n’exclut pas non plus cette hypothèse.

    « C’était des gestes d’hostilité passive si je puis dire, d’hostilité froide. Il n’y avait pas de bonne volonté, pas d’égard ». William ressent une différence de traitement entre ses camarades et lui en cette période cruciale pour lui. « Le conservatoire c’est une sorte de tremplin pour la vie professionnelle, où l’on se constitue normalement un réseau de façon informelle. J’étais un peu orphelin de ce réseau censé être une petite famille. Pour un début de vie professionnelle après, ce n’est pas très heureux, on ne sentait pas la solidarité ».

    Une carrière entravée

    A l’époque, au conservatoire, « il n’y avait pas de référent handicap », se désole-t-il. La présence de tels référents, tend aujourd’hui à se généraliser. L’établissement bordelais indique d’ailleurs sur son site avoir mis en place des « adaptations pédagogiques » pour accompagner « chaque élève en situation de handicap et/ou avec des besoins spécifiques (DYS, haut potentiel, TSA, TDAH, …) »

    La musique ne me permettrait pas de vivre aujourd’hui.

     

    William est désormais pianiste professionnel. « J’ai dû essayer de semer des graines de façon artisanale. Parfois j’ai l’impression d’essayer de gonfler une structure gonflable avec mon propre souffle, mais seul, ça marche pas. Il faut être plusieurs, être fédéré un tant soit peu dans quelque chose. Mes débuts ont été délicats, je ne savais pas quels chemins prendre, donc j’ai pris des chemins buissonniers et j’en suis encore un peu là », ressent celui qui vit chez ses parents. « La musique ne me permettrait pas de vivre aujourd’hui », estime-t-il.

    « J’ai l’impression qu’on ferme les yeux »

    Qu’est-ce qui dysfonctionne ? « Je suis le premier à me poser la question. L’hypothèse numéro un, c’est la méconnaissance de la différence, du handicap, d’un langage qui n’est pas celui d’une personne qui reproduit par mimétisme le comportement des autres mais qui s’est auto-construite et donc une personne avec qui on ne sait jamais à quoi s’attendre », théorise William.

    Pour une personne autiste, qui n’est pas dans une posture d’apparat, quelque chose qui est dit, qui est faisable, et qui n’est pas fait, ça blesse, ça dégrade l’estime de soi.

    Sur son chemin, le girondin multiplie les rencontres d’apparence bienveillantes, mais il ressent toujours une certaine « défiance ». Comme s’il suscitait « de la frilosité ». Cela l’amène à dénoncer certains comportements : « C’est difficile de vivre et cautionner une hypocrisie qui est presque un art de vivre chez certaines personnes. Elle est là, de façon presque complaisante. J’ai l’impression qu’on ferme les yeux sur la question du handicap pour des raisons assez saugrenues. »

    « Ça se répète souvent, les personnes qui font des fausses promesses. Elles ne font pas honneur à ce qu’elles disent. Je considère que c’est une forme de maltraitance. Pour une personne autiste, qui n’est pas dans une posture d’apparat, quelque chose qui est dit, qui est faisable, et qui n’est pas fait, ça blesse, ça dégrade l’estime de soi », témoigne le pianiste. Peut-être Satie, Bruckner, Bartok ou Glenn Gould, eux-mêmes autistes avérés, ont-ils connu pareilles difficultés.

    Richard Monteil

    Zèbres

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