Élevée sur les hauteurs de Saint-Cloud, Olivia Moore s’est passionnée très jeune pour le théâtre. Après son bac, elle suit pourtant des études de droit à la fac et une fois diplômée, occupe différents postes à responsabilités. Jusqu’à ce burn out en 2010, qu’elle qualifie « d’assez sévère » et assimile aujourd’hui à son TDAH (troubles déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité) : « travailler dans un bureau, avec beaucoup de gens, beaucoup de bruit, beaucoup d’interruptions, beaucoup de mails c’est être plongé dans une profusion qui épuise littéralement le cerveau. L’une des caractéristiques du TDAH, n’est pas de ne pas arriver à se concentrer comme beaucoup de croient, mais que l’on n’arrive pas à choisir sur quoi se concentrer. Ce n’est pas une question de volonté : c’est la manière dont le cerveau abrite et traite les informations » résume-t-elle.
Le burn out a été un déclic vers un changement de voie. Rattrapée par sa passion, après 13 ans passés à à exercer un métier «normal » comme elle dit, son choix est fait. Exit la vie de cadre dans l’industrie cosmétique. En 2011, elle devient humoriste. En 2012, elle présente son premier spectacle : Mère Indigne, à Paris et dans toute la France. Premier succès. Depuis, elle les enchaîne avec ses one-woman show : elle remporte le Montreux Comedy Festival en 2013, est désignée lauréate du Festival Humour en Weppes en 2015.
Son métier, elle n’y serait probablement pas arrivée sans son TDAH non plus, dont elle n’a soupçonné l’existence qu’après avoir un jour posté deux vidéos humoristiques aux accents très autobiographiques sur l’hypersensibilité et l’introversion, sur You Tube. Les nombreux messages de ses abonnés, qui l’interrogent sur un éventuel TDAH, l’interpellent. Passé l’effet de surprise et après avoir échangé avec sa psy, elle réalise tous les tests. Le diagnostic tombe en 2022 : Olivia Moore souffre bien d’un TDAH.
Un diagnostic qui la déculpabilise
Soulagée, déculpabilisée, elle s’avoue aussi un peu « vexée » d’avoir eu la bonne intuition que « quelque chose clochait » et qu’elle souffrait, sans le savoir, d’un handicap invisible. Invisible, pour les autres. Pour elle, plus compliqué au quotidien, car Olivia Moore oublie presque tout : ses affaires, ses rendez-vous. « Si je ne note pas un rendez-vous dès qu’on me le donne, il n’aura jamais lieu. Vraiment. Jamais. Car je ne vais pas y repenser. Si je dois de l’argent à quelqu’un, il faut aussi que je le rembourse très vite. Sinon ? J’oublie, » confie-t-elle.
A 45 ans, obligée de composer quotidiennement à la maison, avec ses trois enfants diagnostiqués porteurs du même trouble qu’elle, Olivia avoue dans un éclat de rire ne jamais s’ennuyer. Ni à la maison. Ni au travail, qui lui convient aujourd’hui parfaitement.
Humoriste : un métier adapté aux TDAH ?
Quand on joue sur scène, il faut à la fois mobiliser sa mémoire et plusieurs sens en même temps. Une « ébullition » qui ne la gêne pas. Au contraire : « je pense que la profession d’humoriste est assez adaptée aux porteurs d’un TDAH, puisqu’il faut être à la fois capable de rester concentré sur son texte, de jouer, capter l’humeur du public dans la salle, tout en intégrant ce qui nous vient en tête pendant qu’on joue…Clairement, c’est un truc que tout le monde ne peut pas réaliser ». Elle soupçonne d’ailleurs qu’elle n’est pas la seule et que les TDAH « sont assez nombreux dans le métier ». Sans forcément le savoir. Ou s’en ouvrir.
Elvire Cassan