Vivre à l’ère de l’éco-anxiété  - Zèbres & cie
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Vivre à l’ère de l’éco-anxiété 

Christchurch (Nouvelle Zélande), 5 avril 2024. Des centaines de personnes défilent lors de la grève scolaire pour le climat, appelant à une action urgente
Malgré l'urgence climatique, la COP 30 qui se tenait au Brésil, s'est achevée le week-end dernier sans plan de sortie des énergies fossiles ni engagements pour limiter la déforestation.  Cela ne rassurera pas tous ceux qui souffrent d'éco-anxiété. Personne n'y échappe. Mais cette détresse psychologique, liée à l’incertitude de l’avenir, provoquée par les bouleversements climatiques et l’inaction des décideurs, touche encore plus les jeunes. C’est normal. Et même parfaitement sain.

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    Les records de température n’en finissent plus d’être battus : 2024 est devenue l’année la plus chaude jamais enregistrée. La première depuis 1850 à franchir la barre symbolique des 1,5 °C de réchauffement climatique, selon le programme européen de collecte des données sur l’état de la terre, Copernicus. 2023 détenait déjà ce triste record.

    Cette folle course du mercure ne date pas d’hier. Cela fait déjà plusieurs décennies que les scientifiques tirent la sonnette d’alarme, qu’ils multiplient les rapports inquiétants. Et que les conséquences du dérèglement climatique sont de plus en plus visibles, entre inondations, incendies, vagues de chaleur et tornades. 

    Des événements climatiques extrêmes… désormais systématiquement accompagnés de superlatifs : « hors-norme », « impressionnants », « monstrueux ». Pourtant les engagements politiques et les actions concrètes peinent à suivre, ce qui nourrit chez certains une inquiétude grandissante quant à l’avenir de la planète.

    Cette inquiétude a un nom : l’éco-anxiété. Née de la contraction des mots « écologie » et « anxiété », elle se manifeste de façon diverse selon les individus. Elle peut engendrer mal-être, sentiment d’insécurité, mélancolie ou tristesse, de la sidération, de la honte ou de la culpabilité, une impression d’impuissance ou même de la colère, provoquer des insomnies, une perte de motivation ou rendre difficile toute projection dans l’avenir…

    Dans certains cas -, heureusement plutôt rares -, elle peut même devenir si envahissante qu’un accompagnement psychologique devient nécessaire. A l’inverse, l’éco-anxiété peut aussi agir comme un moteur :  un levier d’action pour pousser ceux qui en souffrent à s’informer sur l’environnement, à s’engager ou réfléchir collectivement à des solutions pour améliorer l’état de la planète ou repenser nos modes de vie. 

    Tous touchés par l’éco-anxiété ?

    En France, 10,5 millions de personnes seraient concernées par l’éco-anxiété, selon l’Agence pour la transition écologique (Ademe), qui a mené, pour la première fois en avril dernier, une étude auprès d’un échantillon de 998 personnes de 15 à 64 ans, représentant par extrapolation 42 millions de Français. L’étude révèle que tous les âges et tous les milieux sociaux sont touchés.

    Avec une légère surreprésentation des jeunes de 15 à 34 ans, que Laelia Benoit, pédopsychiatre à l’hôpital Cochin (AP-HP) et chercheuse à l’Inserm, ainsi qu’au Yale Child Study Center, aux Etats-Unis, spécialisée sur ces sujets, explique par deux raisons. « La première, c’est qu’ils seront les premières victimes des changements climatiques : les premiers à faire l’expérience des conséquences, explique-t-elle. La seconde, c’est qu’ils se sentent souvent impuissants face au problème, car ils ont moins de prise pour agir, du fait de leur âge ».

    Sans compter que, lorsqu’ils le font, la réaction des adultes est bien souvent teintée de mépris. « On a pu l’observer quand la jeune militante Greta Thunberg a créé son mouvement de grève étudiante pour le climat, Fridays for Future, et qu’elle est devenue fer de lance de la lutte contre le réchauffement climatique », décrit Laelia Benoit. « Plutôt que d’écouter son inquiétude, pourtant légitime, essayer de la comprendre et y répondre, ses détracteurs ont préféré critiquer son jeune âge, son sexe, son autisme…», dénonce la scientifique. C’est ce qu’on appelle l’« infantisme », soit la discrimination systémique et collective des mineurs.

    « Ce mépris a une fonction sociale », poursuit-elle : il renforce la complicité d’un groupe—ici, les plus âgés, sur le dos des plus jeunes—. La pédopsychiatre, également sociologue, établit un parallèle avec un autre mécanisme bien connu : celui utilisé par certains hommes — évidemment pas tous ! — qui se plaignent de « leurs bonnes femmes » par exemple, pour créer du lien entre eux et renforcer leur complicité de groupe. De la même manière, le mépris envers les plus jeunes permet aux générations précédentes de consolider leur cohésion, en désignant un bouc émissaire commun. « Par peur, sûrement, qu’ils bousculent nos modes de vie, et  forcent le changement », suppose Laelia Benoit.

    Résultat : les jeunes souffrent davantage d’éco-anxiété. Dans certains cas, cela nourrit même chez eux un profond désenchantement à l’égard des institutions. Selon une autre étude, réalisée par les chercheuses Caroline Hickman et Elizabeth Marks, de l’université de Bath, au Royaume-Uni et publiée en 2021 dans la revue scientifique The Lancet, plus les jeunes évaluent négativement les réponses gouvernementales au changement climatique, plus leur éco-anxiété est élevée. Et plus ils sont par contrecoup enclins à se sentir trahis par ces mêmes autorités. 

    « Une réponse saine, normale »

    Faut-il s’en alarmer ? Et comment répondre à cette éco-anxiété ? Yvan-Marc Juillard, psychologue auteur du livre Mieux gérer ses émotions liées au dérèglement climatique, publié aux éditions La Plage, est catégorique : « Il faut l’accepter ! C’est une réponse saine, normale, en réaction à une crise environnementale anormale », pose l’auteur, rejoint par Jean Le Goff, psychosociologue et docteur en sociologie, qui souligne, lui, l’importance d’échanger sur e nous parler de ce que nous ressentons, d’écouter les vécus des autres, pour nous relier. 

    C’est ce qu’il a lui-même fait auprès de militants écologistes, comme il le raconte dans son ouvrage Politiser l’éco-anxiété, publié aux éditions du Détour, afin de  comprendre comment ils transforment leurs angoisses en solutions constructives. Il continue de le faire régulièrement, en animant avec d’autres facilitateurs des Cafés Climat à Paris * . Des moments d’échange, de rencontre où chacun peut confier son ressenti face à la crise écologique.

    « Même si l’on partage parfois des émotions difficiles, rapporte-t-il, ce sont paradoxalement des moments joyeux et réconfortants ». Car ils permettent aussi souvent de transformer le le sentiment d’impuissance en passage à l’action — engagement, militantisme, réflexions collectives pour améliorer l’état de la planète ou repenser nos modes de vie, investissement dans des associations ou actions locales… 

    Autre conseil, pour accueillir l’éco-anxiété avec sérénité, complète Laelia Benoît : « faire preuve d’indulgence avec soi-même, savoir célébrer les petites victoires, choisir des combats à sa portée —, d’abord des éco-gestes, puis des projets collectifs. » L’idéal, ajoute Yvan-Marc Juillard « est de réussir à concilier des actions qui soient à la fois plaisantes pour soi et bonnes pour l’environnement ». Faire d’une pierre, deux coups en somme : agir pour la planète tout en apaisant son éco-anxiété.

    Anne-Laure Mignon

    * https://www.academieduclimat.paris/evenements/cafe-climat-7/


    Les femmes y sont plus sujettes 

    Le genre est également un facteur déterminant sur le niveau d’éco-anxiété. Toujours selon le rapport de l’Ademe, les femmes en seraient particulièrement affectées  (58%). En partie pour les mêmes raisons que pour les jeunes, analyse la pédopsychiatre Laelia Benoit : elles savent qu’elles seront parmi les premières victimes des conséquences du dérèglement climatique. « Qui dit bouleversement environnemental dit souvent tensions géopolitiques, flux migratoires massifs et sociétés en souffrance : des agriculteurs qui ne peuvent plus travailler, des personnes qui perdent leur emploi, des conditions de vie qui se dégradent… Dans ces contextes de forte frustration collective, le risque d’élire des gouvernements autoritaires ou démagogues augmente. Et la première stratégie de ces régimes, c’est bien souvent de désigner des boucs émissaires. Tous les groupes sociaux vulnérables peuvent être rapidement ciblés : les minorités, les jeunes, les plus pauvres. Et les femmes ». 

    * https://www.academieduclimat.paris/evenements/cafe-climat-7/

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